Manuel II
Manuel II

La particule des noms de famille portugais

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Vous savez comment on voit tout de suite qu'un Portugais vit en France ? S'il écrit Da Silva au lieu de da Silva. Explications.


Le nom de famille au Portugal, ça n’a jamais été quelque chose de très important. On a souvent les mêmes noms, il n’y a pas beaucoup de variété. Je suis par exemple un « da Silva« , comme énormément d’autres ! On sera plutôt connu par des surnoms familiaux que l’on se passe de génération en génération que par le nom de famille, le « apelido » en portugais.

Vous n’êtes pas convaincu ? Quel est le nom de famille de Cristiano Ronaldo ? Les Français (par exemple) ont beaucoup plus tendance à appeler quelqu’un par son nom de famille, ce qui n’arrive pratiquement jamais au Portugal.

  • Hey, Silva ! (…) Lequel ?
  • Hey, Mbappé !

Ce n’est qu’à partir du XVIe siècle et la tenue d’archives officielles que les Portugais, et les européens au sens large, ont commencé à avoir des noms de famille.

Da, Das, De, Do, Dos : toujours en minuscules !

Une très grande partie des noms portugais sont précédés de « da », « de », ou encore « dos ». Il ne s’agit ni plus ni moins que de particules, qui obéissent en portugais exactement aux mêmes règles qu’en français.

Un « de Sousa », ça veut dire qu’il vient de Sousa, une rivière du nord du Portugal. Un « da Silva », originaire d’un village nommé Silva, qui veut dire « bois » en latin (pensez à Sylvestre, c’est la même origine).

Par conséquent, en langue portugaise, nous écrivons toujours avec un « d » minuscule la particule.

Parfois, on n’écrit carrément pas de particule

La particule est très souvent omise. Lorsque vous allez dans une administration, on peut vous demander, simplement, le premier et le dernier nom. Un José Carlos Almeida de Sousa ne renseignera donc que « José Sousa ».

Le peu d’importance de la particule, qui peut s’enlever sans trop de problèmes, signifie une chose : les initiales d’un José da Silva ne sont pas JDS, mais juste JS. Si on veut être parfait, on pourrait faire JdS.

Règles d’usage de la particule

Pour les règles d’usage onomastiques de la particule, je vous propose de lire Wikipédia. Il en ressort :

  • Lorsque le nom est employé sans prénom, titre ni fonction, la particule est élidée.
  • Lorsqu’on désigne plusieurs personnes, la particule disparaît. On dira « A família Santos » ou bien « Os Santos ». Jamais « A família dos Santos ».

Alors on pourra nous dire, oui, mais si on traduit un nom de famille portugais en français, peut-être que c’est normal de mettre une majuscule à la particule ?

Non. Citons toujours Wikipédia : en France, les particules étrangères s’écrivent avec une minuscule initiale lorsque c’est l’usage dans leur langue d’origine.

C’est le cas de la langue portugaise.

La particule, signe de noblesse ?

Mais alors, pourquoi tant de gens écrivent leur nom de famille portugais avec une majuscule à leur particule ?

Je crois tout simplement qu’il y a méprise. Il y a longtemps, quelqu’un, quelque part dans un état civil en France, n’a pas jugé bon de mettre une particule en minuscules. Il n’avait peut-être pas compris qu’il s’agissait d’ailleurs d’une particule.

Vous savez, dans l’imaginaire français, la particule, c’est réservé aux nobles, comment est-ce que ce maçon ou cette femme de ménage pouvait être noble ?

Mais en fait, les véritables nobles, les rois, n’ont même pas de nom de famille. Et de ceux qui ont une particule, seuls la moitié sont véritablement nobles.

J’ai choisi de mettre en photo Dom Manuel II, dernier roi du Portugal. Il ne s’appelle exactement que comme ça : Manuel. Vous vous souvenez de l’obligation d’inscription aux registres de la population au XVIe siècle, et par conséquent l’attribution d’un nom de famille, parfois artificielle ?

Les rois n’en avaient pas besoin.

En revanche, Manuel vient de la Maison des Bragance, mais il ne s’agit pas d’un nom de famille ! Les cartes d’identité des têtes couronnées en Europe sont vraiment spéciales, et ce n’est que très récemment qu’il a été convenu de leur attribuer un nom de famille. Pour raisons pragmatiques, sinon l’informatique bugue.

Je suis un Silva, pas un Da Silva !

J’ai grandit en France. Toute mon enfance, j’étais, par ordre alphabétique, dans les D. J’ai appris à écrire mon nom avec D majuscule à la particule.
Quelle n’a pas été ma surprise, lorsque je suis venu au collège au Portugal, de découvrir que, d’une part, le classement alphabétique se faisait sur mon prénom, et que d’autre part, la particule comptait pour du beurre. J’ai découvert à ce moment là même que c’était une particule, par ailleurs.

Mais j’y reste attaché bien sûr, et j’insiste pour toujours l’écrire, avec un joli « d » minuscule. C’est comme ça que c’est correct, que ce soit en français ou en portugais.

C’est aussi comme ça qu’on reconnaît tout de suite les Portugais de France : ils portent souvent une particule avec la majuscule. C’est impensable au Portugal.


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