Lisbonne
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Noms de villes portugaises en français

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Dire le nom d'une ville étrangère en français, c'est parfois compliqué. Pour cette raison, de nombreuses villes ont eu un nom "francisé", comme Lisboa qui devient Lisbonne... mais pas Porto. Voyons ça de plus près.


Avant toute chose, ce n’est pas l’apanage des français de « franciser » des noms étrangers. Les portugais le font tout autant, les italiens aussi, etc. On a envie de dire que c’est « naturel » de transcrire des noms propres étrangers dans notre langue de façon à ce que l’on puisse les prononcer.

Qui sait dire Guangzhou correctement? C’est bien plus facile de dire Canton! Il est vrai qu’au XXIe siècle, c’est de moins en moins acceptable, et des efforts sont faits pour tenter de se rapprocher des « véritables » noms… même si les Portugais vont continuer de dire « França » au lieu de « France » !

Honoré d’être francisé

Au lieu de se sentir « outrés » parce que l’on dit Lisbonne au lieu de Lisboa en français, on devrait même se sentir… honorés. Oui, parce que ça veut dire que la ville est assez importante pour mériter une « francisation ». Qui pense à traduire en français le village de « Mata Mourisca » ? Personne.

Villes portugaises « francisées »

Seules trois villes portugaises ont, à ma connaissance, leur nom traduit en français : Lisbonne, Bragance et Coïmbre.

D’autres villes, plus importantes comme Porto, n’ont pas de nom en français. Pourtant, Porto possédait il n’y a pas si longtemps son nom « anglophone », « Oporto ». Il n’y a pas de règle établie, pour ce cas précis, ce n’est probablement que dû au fait de Porto faire du commerce avec les anglais, et pas avec les français. On francisait les noms que si on en avait besoin.

Seules les villes disposant d’un certain prestige, dont le nom revenait souvent par le passé en France, se sont donc vues francisées. Même des villes très importantes pour les portugais, au nom pourtant très difficile à prononcer en français n’ont pas eu « l’honneur » d’une version française. C’est le cas de Guimarães !

L’usage du français pour Lisbonne, Bragance et Coïmbre est tout ce qu’il y a de plus officiel. Il suffit de regarder Google Maps ! Bing Maps, ça marche aussi.

carte du Portugal
Le Portugal sur Google Maps version française. J’ai mis en évidence les trois villes au nom francisé.

Lisboa devient Lisbonne

Si vous regardez les autres langues européennes, la plupart ajoutent un « N » à Lisboa. Lisbon en anglais, Lisbona en italien, Lisbonne en français.

L’Allis Ubbo des Phéniciens, puis l’Olisipo des Romains, devenue Ulishbuna avec les Wisigoths ou encore al-Ushbuna sous la domination musulmane finira par adopter le nom de Lisboa au Moyen Âge. Il ne s’agit que de l’évolution de la prononciation de la ville, dans la langue majoritaire du moment.

Le « boa », issu de l’ancien « ippo » d’Olisipo n’a rien à voir avec le terme français « bonne ». Ce terme, issu des Tartessiens (un peuple de péninsule ibérique) veut dire « port ». Si les français l’ont traduit en « bonne », ce n’est que pour une question de simplicité de prononciation, et rien d’autre. Une prononciation finalement plus proche de l’ancienne prononciation de Lisbonne !

Bragança devient Bragance

C’est une petite ville que voici. Même si elle est capitale de district, c’est presque une bizarrerie que son nom soit francisé.

Pourquoi franciser un tel nom? Peut-être parce qu’à l’oreille, « Bragance » prononcé à la française, ça ressemble plus à « Bragança » prononcé à la portugaise. Il ne faut tout de même pas oublier que l’analphabétisme était non pas une exception, mais la norme à l’époque de ces traductions, et on faisait au plus simple, au plus sonore.

Catherine de Bragance
Catherine de Bragance, reine d’Angleterre

Si Bragance a eu le « privilège » d’avoir son nom traduit, ce n’est sans doute pas étranger à la prestigieuse famille des ducs de Bragance, liée à un bon nombre de maisons royales en Europe, en plus, évidemment, de la portugaise. Les noms de la noblesse sont très souvent traduits, même aujourd’hui. Nous ne disons pas Elizabeth pour la reine d’Angleterre, mais bien Elisabeth !

Coimbra devient Coïmbre

Le prestige de Coïmbre et de son Université n’est plus à faire. Son nom a été francisé, pour simplifier la vie des français depuis le Moyen Âge. C’est également le cas par exemple de Salamanque en Espagne (Salamanca en espagnol), et bien d’autres Universités médiévales européennes.

Si vous prononcez correctement Coïmbre en français, vous serez plus proches de la sonorité portugaise de Coïmbra en portugais. En portugais, nous ne prononçons pas Coïmbraaaa en appuyant sur le A !

Des noms latins devenus français ?

Précisons tout de même qu’autrefois, jusqu’au début du Siècle des Lumières, la langue de communication internationale était le latin. Il n’y avait donc pas lieu de franciser dans la littérature des noms que tous les intellectuels comprenaient. Lisboa était ainsi pour tout le monde « Lisbonum », en mauvais latin de cuisine (ou, si je voulais être méchant, en latin d’église…).

La montée en puissance des échanges commerciaux internationaux ont apporté de nouveaux besoins. Le latin céda sa place au XVIIIe siècle au français en tant que langue internationale, et Lisbonum devient la Lisbonne actuelle.


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