Il y a de ces personnes qui manquent cruellement, qui laissent un vide énorme quand ils ne sont plus là. Sérgio Vieira de Mello en fait partie. Qui se souvient de la tragique journée du 19 août 2003? Ce fut un jour comme un autre à Bagdad, ponctué d’attentats et de meurtres. Sauf que ce coup-ci, l’attentat fut dirigé contre le siège des Nations Unies en Irak. Des gens qui sont là pour aider, qui sont impartiales, qui représentent le reste du monde.
Sérgio Vieira de Mello mourut ce jour là, lui et 21 membres de son équipe. Inutilement, juste pour assouvir la soif de sang de quelques fondamentalistes aveuglés par une haine mal canalisée : tout ce qui était étranger était diabolique. Sérgio, diplomate brésilien reconnu pour son courage, son charisme et ses compétences immenses, avait laissé une impression immense de savoir-faire lors de son passage au Timor Oriental, pendant les longs troubles qui ont secoué ce petit pays, ancienne colonie portugaise.
Fils de diplomate, on peut dire qu’il avait la diplomatie dans la peau. Né en 1948, il était devenu fonctionnaire de l’ONU dès ses 21 ans, en 1969. Ayant étudié au lycée Franco-Brésilien de Rio de Janeiro, il fit ses études universitaires à la Sorbonne, à Paris. Ceci explique son français impeccable, et son doctorat en philosophie. La majeure partie de sa carrière au sein de l’ONU se fera dans l’UNHCR, le haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés, actuellement présidé par le portugais António Guterres. Il était la personnification de ce qu’un diplomate de l’ONU se devait d’être : capable d’aller dans le feu de l’action, pragmatique, flexible et surtout très efficace dans l’art de négocier avec des gouvernements corrompus, à la recherche de la Paix. On se souvient d’avoir presque vu en direct les attaques de rebelles pro-indonésiens au siège de l’ONU à Dili, capitale du Timor Oriental, où se trouvait Sérgio. Cette expérience ne l’a pas empêché de partir en Irak malgré l’immense danger que celà representait, à la demande de Kofi Annan, le secrétaire général de l’ONU à l’époque.
Sur son CV, il aura aidé à négocier la Paix au Cambodge, au Bangladesh, au Liban, en Bosnie, au Kosovo, au Rwanda, au Timor Oriental et finalement, en Irak. Il est finalement mort dans l’écroulement de l’édifice de l’ONU dans lequel il se trouvait avec ses collaborateurs, détruit par un attentat suicide, un camion bourré d’explosifs. Il aura eu le temps de faire deux appels avec son téléphone mobile, avant de mourir…
La critique dira qu’il était également un séducteur et coureur de jupons, froid et distant, malgré son charme ravageur. La critique dira qu’il était drogué aux conflits, et qu’il avait besoin d’adrénaline. La critique dira également que toutes ses négociations ont échoué. La critique n’aura pas forcément tort. Mais qui d’autre aurait pu le faire? Est-ce qu’un seul homme aurait pu résoudre le conflit en Irak? En ex-Yougoslavie? Que peut le représentant de l’ONU, face à de tels conflits barbares où la raison n’existe plus? Qui aurait encore osé continuer de travailler, après un premier attentat, comme lui, tout en sachant que le siège de l’ONU n’était pas suffisamment protégé? Deux mois après son arrivée à Bagdad, il avait déjà été victime d’un premier attentat, qui fit 22 morts. Et dire qu’il aurait raté ses missions, c’est ignoré les immenses progrès qu’il a tout de même pu obtenir dans ces conflits majeurs, du rapatriement de 300 000 refugiés cambodgiens en Thaïlande à l’établissement d’une administration de l’ONU au Kosovo en passant à la gestion de la transition politique au Timor Oriental.
Il succombera finalement au deuxième attentat contre le siège de l’ONU à Badgad, laissant un vide diplomatique en Irak, totalement embourbé dans la guerre. Les États-Unis avaient le champ libre pour faire n’importe quoi désormais (encore plus que d’habitude…). Il faudra attendre un an pour qu’un autre haut représentant de l’ONU vienne en Irak, Ashraf Jehangir Qazi, succédé depuis par le suédois Staffan de Mistura.
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