São Bento, palais du Parlement
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Législatives 2022 : majorité absolue pour le PS

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Les élections de 2022, provoquées par les anciens alliés du PS, furent la confirmation d'une chose : les Portugais n'aiment pas l'instabilité.


La victoire du Parti Socialiste en 2022 était presque acquise. Les Portugais sont, dans l’ensemble, satisfaits du gouvernement de ces 6 dernières années. Considéré comme étant la personne la plus compétente au poste de Premier Ministre, António Costa a été reconduit. La confiance des Portugais est encore plus marquée en 2022, malgré la pandémie.

C’est d’autant plus notable que l’abstention est en baisse, à « seulement » 42%, malgré les masques, le gel hydroalcoolique et le vaccin.

Majorité absolue

Les sondages donnaient pourtant une victoire difficile pour le Parti Socialiste. Personne ne parlait de majorité absolue. Certains sondages disaient même que le PSD, l’opposition, pouvait se retrouver en tête.

Pourtant, un indice ne trompait pas : António Costa était systématiquement jugé comme étant la personne la plus compétente. Une compétence mise à mal par ses propres alliés donc.

La majorité absolue a été atteinte cette fois-ci, provoquant le deuxième meilleur score du PS de l’histoire démocratique du Portugal. L’électorat de gauche s’est massivement reporté sur le PS, voulant deux choses :

  • La stabilité du gouvernement.
  • La punition des fauteurs de trouble par dogmatisme abscons.

Avec près de 42% des voix et 117 députés déjà élus, plus de la moitié du Parlement est désormais socialiste. Pour rappel, en 2019, le PS avait fait 36%, et en 2015, 32%. Une progression constante.

Une instabilité artificielle

Lors du premier mandat du premier ministre António Costa, un accord avait été trouvé avec les autres partis de gauche afin de faire barrage à la droite. Cet accord, signé, obligeait le Parti Communiste et le Bloco de Esquerda de respecter les grandes décisions du gouvernement PS, dont le budget de l’Etat.

C’était la Geringonça, que l’on pourrait traduire en français par « bidule ». Un truc fait de bric et de broc, qui risque de s’écrouler n’importe quand, mais qui fonctionne. Pour le deuxième mandat, António Costa n’avait pu obtenir de ses partenaires de gauche le même accord. Le pacte était cette fois-ci tacite, un accord de non agression.

Les négociations du budget 2022 furent âpres. Les communistes et les « bloquistes » trouvant que le PS n’investissait pas assez dans le social. Face au refus catégorique de ces deux partis d’approuver le budget, le pays était bloqué. Il fallait convoquer de nouvelles élections.

Une incompréhension s’est installée au Portugal. Pourquoi les « bloquistes » ont-ils fait tomber le gouvernement ? Pourquoi avoir provoqué de l’instabilité, pour des considérations somme toute très dogmatiques ? Ils ont été tenus comme responsables de ces nouvelles élections, et risquaient d’être punis… ce qui est arrivé. Une punition ravageuse pour le Bloco de Esquerda.

La montée du Chega et la mort du CDS

C’est peut-être la plus grande nouveauté des élections 2022. Le Chega est devenu la troisième force politique au Portugal. Une montée fulgurante, principalement due à la personnalité de son leader, André Ventura. Ils passent du seul député André Ventura en 2019 à 12 députés en 2022 et 7% des voix.

Pour cela, l’extrême-droite que le Chega représente peut vivement remercier l’extrême-gauche. Un contre-sens. Mais il ne faut pas se tromper : le pays n’est pas vraiment plus à droite qu’autrefois. Il s’agit plutôt d’une radicalisation d’un électorat, celui du CDS.

Le CDS, parti autrefois le plus à droite de l’hémicycle portugais, n’existe plus en 2022. Il n’a pas réussi à élire un seul député, avec seulement 1,6% des voix. Le Chega a tout simplement siphonné ce parti, qui faisait encore 4% en 2019. Il faut dire que le leader du CDS, « Chicão », n’a pas l’aura d’André Ventura. Ce dernier, un habitué des plateaux de télévision depuis qu’il était un commentateur sportif, était dans son élément. Il est vrai que c’est plus facile de crever l’écran lorsque l’on transmet des idées aux punchlines basiques, mais efficaces.

PSD, inchangé

Par rapport à 2019, le nombre de voix a été presque un copié collé pour le principal parti de l’opposition. Près de 28% des voix en 2019 et en 2022. Par le hasard des découpages électoraux, le PSD élira un peu moins de députés cette année, mais le principal est sauvegardé. Le parti n’a pas perdu sa base électorale, malgré une nouvelle concurrence forcenée à sa droite, entre le Chega qui monte et le Iniciativa Liberal.

Rui Rio, son leader, déplore principalement une chose : les gens de droite n’ont pas jugé bon de faire un vote « utile » comme l’ont pu faire ceux de gauche. C’était cousu de fil blanc, les gens de droite n’ayant pas de raison particulière pour « punir » les petits partis de droite…

Iniciativa Liberal

Le trublion des élections, le parti libéral, est lui aussi, comme le Chega, en hausse. Avec un discours provocateur et quelque peu démagogique, l’électorat qui pense que le mal du pays, c’est les impôts, a été présent. 5% des voix pour le « IL », représentant 8 députés à l’assemblée. C’est une nette progression, face au seul député élu en 2019.

Ils vont, quelque part, représenter les gardiens du portefeuille des Portugais, afin que le PS ne dépense pas inconsidérément l’argent des impôts…

Les petits partis de gauche en baisse

Le besoin de donner de la stabilité au pays a été ravageur pour les petits partis de gauche. Le report des voix a été massif.

  • Bloco de Esquerda : passe de 19 députés en 2019 à seulement 5.
  • CDU (communistes) : passe de 12 députés en 2019 à 6 en 2022.
  • Le PAN (animaliste et écologiste) : passe de 4 députés en 2019 à seulement 1 désormais.
  • Le Livre est le seul qui tire son épingle du jeu, conservant son député unique à l’assemblée.

Députés de l’étranger ?

Comme à chaque élection, les 4 députés de l’étranger ne sont connus que tardivement. Ce n’est que le 10 janvier que les résultats ont été dévoilés. 2 députés pour le PS, 2 également pour le PSD.

Mais c’est, depuis trop longtemps, une secondarisation des Portugais de l’étranger que je trouve frustrante. A quoi bon voter ? Si peu de députés pour tant de millions de Portugais, avec des résultats communiqués bien après…

Responsabilité de António Costa

Avec une majorité absolue, le PS peut faire cavalier seul. Il est libre de gouverner comme bon il l’entend. La responsabilité est par conséquent immense. Rendez-vous dans quatre ans !

Le Premier Ministre a, quand à lui, affirmé qu’il ne gouvernerait pas seul, mais le ferait en accord avec les autres partis. De belles paroles, comme toujours en politique.

Le détail des résultats est disponible sur le site officiel des élections.


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