Bruno de Carvalho
Bruno de Carvalho

Big Brother, phénomène de téléréalité

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J'avoue, je confesse. J'ai regardé le premier des Big Brother sur TVI au Portugal en l'an 2000, il y a maintenant plus de 20 ans. Et, moi comme le reste du pays, nous suivions attentivement les péripéties de cette première expérience télévisuelle. Aujourd'hui, Big Brother existe toujours, mais ce n'est plus tout à fait la même chose...


C’est en regardant d’un oeil distrait la télévision chez mes parents l’autre soir que je m’aperçois que Big Brother était de retour. C’était le soir où le vainqueur allait être déclaré. Cette émission, à l’immense popularité par le passé, a défrayé la chronique et a auréolé TVI de polémique.

Pendant 120 jours, plusieurs concurrents vivent en autarcie dans une maison, surveillée par les caméras d’une émission de télévision. Périodiquement, les concurrents sont expulsés, un à un de la maison. Le vainqueur est celui qui reste en dernier.

Aujourd’hui, c’est l’édition « Célébrités » qui est à l’honneur. Mais que vient faire l’ancien président du Sporting dans cette galère ?

Téléréalité numéro 1

Nous étions en l’an 2000. La téléréalité n’existait pas encore au Portugal. TVI, la quatrième chaine, était en train de se relancer après bien des déboires les années précédentes.

Logo du premier Big Brother
Logo du premier Big Brother

En important le concept de « Big Brother », né aux Pays-Bas, la chaîne savait qu’elle allait connaître le succès.

Chaque jour, c’étaient des millions de Portugais qui suivaient les aventures de Zé Maria, Telmo, Marco ou Susana. Ce premier groupe de concurrents ne savaient pas dans quoi ils se fourraient. Pour cela, ils étaient sincères et naïfs, d’une franchise qui a largement payé aux yeux des spectateurs.

De mon point de vue un peu plus « intello », c’était aussi une formidable expérience sociale. Comment réagissent des personnes qui se savent observées en permanence ? Ce qui m’a peut-être le plus frappé, c’est que nous, simples spectateurs, finissions par discuter de la personnalité de chaque concurrent, en essayant de deviner la suite de ce qui allait arriver.

Nous discutions de personnalités qui n’avaient rien fait de spécial pour mériter d’être célèbres. De personnalités qui ne recherchaient même pas vraiment à être célèbres.

Les goûts des Portugais

Le choix du vainqueur de cette première édition est révélateur de la mentalité portugaise. Ont-ils choisi le parachutiste, le beau gosse ? Non. Ils ont choisi le plus gentil, humble, pour ne pas dire « simplet » de ce premier groupe, Zé Maria. Je me souviens de ne pas l’apprécier. Trop mou, trop humble, quelqu’un qui ne m’inspirait rien.

Zé Maria de Big Brother
Zé Maria de Big Brother

Un mec gentil, mais pas un exemple, selon moi, pour un Portugal que nous voulons meilleur.

La suite m’aura donné raison. Incapable de gérer sa nouvelle célébrité, il ira de déboires en déboires, entre faillites et tentatives de suicide. Il est aujourd’hui à la limite de la pauvreté. C’est une histoire bien triste pour quelqu’un qui est, dans le fond, un bon gars.

Echaudée par ce genre de polémiques, TVI sélectionnera plus attentivement les concurrents des autres éditions.

Oui, la téléréalité peut broyer ses participants. D’autant que les compensations financières sont dérisoires, face à une célébrité pas vraiment méritée.

Editions suivantes

Sans concurrents franchement charismatiques, désormais avertis, la spontanéité de l’émission de télé n’y était plus. Et les audiences, même si elles étaient bonnes, n’étaient nullement comparables avec la première édition, qui atteignait un score faramineux de 60% de « share ». Qui se souvient du vainqueur de la deuxième édition ? (Un certain « Icas » pour info).

Il y aura 4 éditions de ce Big Brother avec des anonymes, la dernière se terminant en 2003.

En 2020, TVI reprend le concept, et propose une nouvelle édition, BB 2020, toujours avec des anonymes. Cette nouvelle édition récompense beaucoup moins financièrement ses participants, on passe de 100 000 euros à 52 000… D’autres éditions suivront, toujours avec des anonymes.

Claudio Ramos et Manuel Luís Goucha
Claudio Ramos et Manuel Luís Goucha, les présentateurs de l’édition 2021, sont deux gays assumés. Cela ne dérange personne, et ils sont des records d’audiences avec d’autres émissions. La tolérance portugaise n’est pas une légende.

BB 2021, qui s’est terminée le 31 décembre 2021, a vu gagner une Portugaise émigrée en Suisse, Ana Barbosa.

Ana Barbosa
Ana Barbosa, gagnante de l’édition 2021

Est-ce que les Portugais, par le choix de cette nouvelle personnalité, nous montre une évolution dans les mentalités ?

Je vous laisse juger, en vous présentant sommairement la gagnante :

  • Elle est née dans une famille pauvre
  • Son père était alcoolique, l’obligeant à fuir la maison
  • Elle part pour la Suisse, où elle a commencé par être une femme de ménage dans des écoles
  • A été mannequin
  • A étudié, lui permettant de décrocher un bon travail dans une multinationale suisse
  • Enceinte, on lui diagnostique un cancer lors de l’écographie
  • Elle a un profil de battante, de leader

Nous ne sommes pas du tout dans un profil « à la Zé Maria », et franchement, j’en suis bien content.

Big Brother Famosos, célébrités

TVI, pour renouveler sa poule aux oeufs d’or, a présenté aux Portugais un autre format. Au lieu d’anonymes, on présente des célébrités. Ils ont un double avantage : les spectateurs ont envie de voir des célébrités, et les célébrités sont plus stables émotionnellement face, justement, à l’exposition médiatique. Il s’agit d’éditions plus courtes, en général d’une soixantaine de jours.

Après deux éditions en 2002 et une édition en 2013, Big Brother Famosos est de retour en 2022. Le succès est directement lié aux personnalités célèbres qui y participent.

Cristina Ferreira
L’édition des Famosos 2022 est présentée par Cristina Ferreira, superstar des présentatrices télé au Portugal.

Et il faut dire que le plus souvent, ces « célébrités » sont vaguement connues, expliquant le manque d’audiences des précédentes éditions. Mais pour 2022, ça semble différent.

Bruno de Carvalho
Bruno de Carvalho

Ils ont réussi à convaincre l’ancien président du Sporting Clube de Portugal, Bruno de Carvalho, a participer, aux côtés de l’ancien joueur de foot Mario Jardel, du chanteur Kasha ou de l’acteur Nuno Homem de Sá entre autres « à moitié connus », du moins pour moi.

Jardel et Kasha
A gauche, Mario Jardel, de très bons souvenirs pour les Portistas et les Sportinguistas. Il a marqué tellement de buts ! A droite, Kasha, chanteur du groupe D.A.MA

Pour ceux qui ne connaissent pas trop Bruno de Carvalho, je rappelle qu’en tant que dirigeant sportif Portugais, il partage certains traits de caractère avec ses congénères. Polémique et polémiste, pas très copain avec les arbitres et ami du bon mot ou de la bonne vanne…

On se souvient de la fameuse attaque de supporteurs du Sporting aux joueurs de leur club alors qu’ils s’entraînaient à Alcochete. Accusé de l’avoir organisée, Bruno de Carvalho a été destitué de la présidence.

Il a été plus tard totalement innocenté, faute de preuves. Il est devenu depuis un DJ. On peut dire que l’homme a de la ressource.


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