Tous les 4 ans, les Portugais élisent leurs responsables politiques locaux. Souvent un test pour le gouvernement, les élections municipales sortent pourtant très souvent du schéma classique. En 2021, année électorale, les Portugais ont réservé bien des surprises au PS, parti du gouvernement...
Découvrez qui a gagné les élections dans votre concelho et freguesia : Résultats officiels 2021 du CNE
Sommaire
Plus proche de la réalité quotidienne des gens, les élections locales sont en général bien plus conservatrices que des élections nationales. C’est ainsi que l’on peut retrouver à la tête d’une municipalité le même maire depuis des dizaines d’années. En 2021, ce schéma a été maintenu, nous avons toujours un sud plutôt ancré à gauche, et un nord plutôt associé à la droite. La carte, issue du media Observador nous le montre encore, dans les grandes lignes.
Plutôt orange moitié nord (PSD, centre droit) et plutôt Rose moitié sud (PS), voire même communiste dans certaines grandes municipalités de l’Alentejo.
Grand vainqueur, le PS
Malgré une érosion inévitable du parti au pouvoir, si on regarde les résultats nationaux, force est de constater que le Parti Socialiste est toujours le grand vainqueur. Avec 34% des voix, il a presque trois fois plus de votes que son concurrent le plus direct, le PSD. Le PSD, pour pouvoir se mesurer presque à armes égales, est obligé de s’allier à un parti moribond, le CDS. Malgré cela, si on ajoute les votes du PSD à ceux du PSD allié au CDS, ça ne fait que 24% des voix, bien loin du PS.
Mais il s’agit d’une victoire en demi-teinte, comme nous allons le voir.
La droite traditionnelle en déroute
Le CDS poursuit sa descente en enfer. Il ne représente plus que 1,5% des voix, lui qui était autrefois le 4ème parti portugais. Loin derrière le Chega, le parti d’extrême-droite qui lui a complètement siphonné les voix.
Le PSD, lui, s’en sort bien, grâce à une victoire emblématique.
Lisbonne devient PSD
Grâce à la personnalité de Carlos Moedas, le PSD a remporté en 2021 la mairie de Lisbonne. Il est par ailleurs marié à la brillante professeur Céline Abecassis, une française professeur à la Universidade Católica.
Ancien secrétaire d’état lors du gouvernement PSD de Pedro Passos Coelho, il devint commissaire européen en 2014. Originaire de l’Alentejo, Moedas présente la particularité d’avoir grandi dans une famille communiste, une vision politique qu’il na visiblement jamais partagé.
Sa victoire a pourtant été courte : il n’y a qu’un seul petit pourcent d’écart avec le candidat perdant du PS, Fernando Medina, 34,3% contre 33,3%. Peut-être que Medina, maire sortant de Lisbonne, n’a pas assez inauguré de nouveaux projets le derniers mois avant les élections…
Les travaux de dernière minute
Plus proches de leurs administrés, les élus locaux se doivent de montrer « obra feita« , du travail réalisé à chaque échéance électorale. Au Portugal, curieusement, la quantité de routes nouvellement goudronnées semble exploser à la veille des élections. Je ne saurais dire si c’est ma perception des choses ou une réalité, mais cette impression semble communément partagée par les Portugais…
Il existe aussi quelques non-dits, du moins à Lisbonne. Aucun des deux candidats n’est né à Lisbonne. Medina est de Porto, où il est né et a fait ses études. Moedas est de Beja, mais a fait ses études à Lisbonne. Est-ce que cela joue?
Les habitudes électorales
Certaines villes ne changent pas, et ne changeront jamais. Loin des intérêts des partis, elles votent pour des personnes avant tout. Nous avons deux exemples emblématiques qui illustrent à la perfection mes propos.
Isaltino Morais, maire de Oeiras
Isaltino Morais est indépendant, et a, encore une fois, remporté une brillante victoire à Oeiras, une grande ville de la proche banlieue de Lisbonne. Il est indépendant, parce que son parti, le PSD, l’a mis à l’écart. Il avait en effet été condamné par le passé pour corruption, blanchiment de capitaux, bref, la totale. Il a d’ailleurs purgé un an de prison effective en 2013/2014.
Mais le peuple de Oeiras l’aime. Parce que, malgré le fait qu’il soit un corrompu avéré, de l’aveu même de ses administrés, « lui au moins, il travaille aussi pour nous ». Nous pouvons faire un parallèle, d’un point de vue français, avec Patrick Balkany, lui aussi maire d’une ville riche de proche banlieue de la capitale…
Il faut savoir que Oeiras est une ville où de nombreuses sociétés y élisent leur siège social, et paient par conséquent des impôts, faisant de Oeiras une ville riche. C’est toujours plus facile de travailler en tant qu’élu local dans de telles conditions.
Rui Moreira, maire de Porto
Avec le maigre appui du CDS, mais en tant qu’indépendant, Rui Moreira, né et élevé à Porto, a remporté la mairie en 2013. Face à une concurrence absente, et peut-être grâce au fait qu’il soit un vrai natif, très bien intégré à « sa » ville, il a gardé une popularité assez impressionnante. Il faut dire qu’il était, avant d’être maire, le président de l’association commerciale de Porto.
En 2021, il est certes moins flamboyant, érodé par des années à la tête de la municipalité, mais reste très loin du deuxième parti : 40,7% des voix contre les 18% du PS ! Seule ombre au tableau : il ne dispose plus de la majorité absolue.
Pombal, à jamais PSD
Je me devais de vous parler la ville dont ma famille est originaire. A Pombal, on change les maires, on garde le PSD depuis 1993. Jusqu’en 2013, Narciso Mota, PSD, détenait le pouvoir. Fâché avec la direction de son parti, il est écarté et se candidate en tant qu’indépendant, élections qu’il perdra contre le candidat officiel du PSD, Diogo Mateus.
En 2021, Diogo Mateus ne se recandidate pas. Non pas par manque d’envie (contrairement à ce qu’il puisse dire), mais parce qu’il n’a plus l’appui du PSD. C’est un nouveau candidat qui est mis en avant, Pedro Pimpão, très net vainqueur en 2021.
Nous avons ainsi les deux cas de figure : soit on vote pour des gens, quelque soit – ou presque – leur parti, soit on vote pour un parti, quelque soit la personne.
La politique locale sort vraiment des schémas classiques ! Une chose est sûre, dans le local, tous les coups sont permis. On voit passer les attaques personnelles sur les réseaux sociaux, les affiches collées n’importe où, les distributions de cadeaux et autres inaugurations sauvages pour cause d’échéances électorales.
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