Les automobilistes portugais sont un paradoxe. Fous du volant, mais respectueux des passages piétons.
On entend souvent des français se plaindre de la façon de conduire des portugais. Ils seraient fous au volant, irrespectueux et parfois suicidaires. Au vu des chiffres de la mortalité il y a une vingtaine d’années, on pourrait leur donner raison.
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A part la Corée du Sud, c’était le pays où l’ont mourrait le plus d’un accident de la route ! Mais depuis, les chiffres de la mortalité sur les routes portugaises ont bien changé, le pays se situant maintenant dans la moyenne européenne. Peut-être que tout a été une question d’apprentissage, avec une plus grande sensibilisation des jeunes automobilistes aux dangers de la route ? Ou bien est-ce que les voitures sont beaucoup plus sûres qu’il y a 20 ans ?
Essayons de voir les différences purement culturelles au volant entre les deux pays.
Apprendre à conduire au Portugal
Il y a plus de 20 ans, je passais mon permis. Au Portugal. Il s’agissait surtout à apprendre à maîtriser son véhicule, et à respecter le code de la route. Mais la culture de la vitesse était déjà présente, l’instructeur lui-même m’enjoignant à accélérer un peu plus, il était en retard à un rendez-vous.
Avoir son permis au Portugal n’est plus dur ou facile qu’en France. En 2019, il faut ainsi 28 heures d’apprentissage du code de la route et 32 heures d’apprentissage de la conduite. Ces heures sont obligatoires au Portugal. En France, on peut se présenter en tant que candidat libre. Souvent, les auto-écoles françaises permettent des formations en seulement 20 heures de conduite… mais on se retrouve plutôt à en faire 35 pour être sûrs de passer à l’examen.
Nous avons donc des formations, en nombre d’heures, plutôt équivalentes, même si au Portugal les 32 heures sont obligatoires, tandis qu’en France elles sont plutôt fortement conseillées.
Ce qui change surtout entre une auto-école française ou portugaise, c’est le prix. Il est ainsi beaucoup moins cher de passer son permis au Portugal qu’en France. En revanche, et c’est normal, il faut parler le portugais, les examens étant dans la langue de Camões.
Mais si c’est comme en France, alors pourquoi les portugais seraient des fous du volant ? Je pense qu’il s’agit surtout d’un préjugé sur les conducteurs latins. Ayant énormément conduit dans les deux pays, tant en campagne qu’en grandes villes, les portugais ne sont pas plus idiots qu’ailleurs en moyenne, avec certaines nuances que nous allons voir.
Sur les petites routes
Les personnes qui habitent dans les campagnes ont le même rapport à la voiture dans les deux pays. C’est un outil obligatoire, presque de survie dans des endroits où le transport public n’existe pas. On conduit souvent vite dans des petites routes, parfois on ralenti pour faire attention aux petits vieux qui roulent toujours à 70 km/h.
Ce qui change essentiellement, c’est la traversée des villages. Au Portugal, on ralenti « un peu » (parfois pas du tout), tandis qu’en France, on respecte le plus souvent la limite des 50 km/h.
Pourquoi ? Parce que les villages sont très bien signalisés, et qu’il y a beaucoup plus de dos d’ânes. Et des radars. Beaucoup de radars.
Mais surtout, la campagne au Portugal, surtout sur le littoral, est constellée de villages. On pourrait presque dire qu’il s’agit d’un village géant, entrecoupé de zones vertes. Un conducteur peut perdre patience, il n’a pas forcément envie de rouler tout le temps à 50km/h (même s’il devrait). De plus, les routes y sont souvent assez larges, incitant à aller plus vite.
En France, les villages sont plus clairsemés, avec souvent de petites ruelles serrées.
Les différences sont ainsi essentiellement au niveau de la configuration même des routes de campagne entre les deux pays, les portugaises n’incitant pas à la prudence.
Sur les nationales
Les nationales portugaises sont bien plus dangereuses que les françaises, c’est un fait. Elles traversent d’innombrables villes et villages. Le revêtement est souvent défoncé par les camions ne voulant pas payer d’autoroute.
Les portugais, qui font la route tous les jours, sont donc habitués à rouler vite. Ils connaissent par coeur leur route, et savent où se situent chaque trou, chaque danger, chaque village. Un touriste qui vient pour la première fois est beaucoup plus prudent, ne comprenant pas que l’on puisse aller beaucoup plus vite que lui. Par conséquent, il pensera que le portugais est un fou du volant. Sans doute roule-t-il plus vite, certes, mais il va surtout au travail, il n’est pas en vacances.
Ce n’est bien sûr pas une excuse, mais ça nous permet de mettre en perspective la différence d’état d’esprit au volant. Ce type de comportement se retrouve également en France d’ailleurs, entre les touristes et les locaux.
Encore une fois, ce qui va changer, c’est la configuration de la route, pas tant la mentalité.
Les autoroutes
Ici, nous avons une véritable différence. Dans la limitation légale pour commencer. 120 km/h au Portugal contre les 130 km/h en France. Nous avons deux extrêmes au Portugal sur les autoroutes. Ceux qui conduisent lentement, en pensant aux économies de carburant, et ceux qui pensent que les autoroutes sont un gigantesque circuit.
L’absence de radars fixes est une véritable autorisation de dépassement de vitesse. L’absence de permis à points jusqu’en 2016 également. Mais ceux qui en profitent principalement, ce ne sont pas les portugais. Il n’est pas rare de voir des plaques d’immatriculation étrangères dépasser à plus de 200 km/h au Portugal. Ils se vengent de la frustration ressentie chez eux, peut-être ?
D’autres sont largement au dessus des limites. Des travailleurs, en fourgonnettes blanches très puissantes. Et finalement, des voitures noires de personnes importantes. En France aussi, on les connait. Politiciens intouchables ou chefs d’entreprise au dessus des lois…
Les riches… et les jeunes
Souvent, les riches pensent qu’ils ont plus de droits que les pauvres. C’est très visible en voiture, où une grosse Porsche Cayenne S pourrait penser qu’elle a plus la priorité qu’une modeste Renault Twingo, faisant fi du code de la route.
Les jeunes conducteurs, eux, ne sont pas encore conscients des dangers de la route. Une fois le véhicule maîtrisé, la vitesse peut griser. Un jeune conducteur croit savoir, et se permet toutes les imprudences. C’est bien connu, on pense être invulnérable quand on est jeune !
Ce manque d’expérience se voit dans le gros A collé sur l’arrière des véhicules portugais. Les conducteurs qui ont leur permis depuis moins de trois ans sont ainsi obligés d’apposer ce A. Leur permis est ainsi probatoire (comme en France), pouvant être retiré dès la première erreur.
En ville
Sincèrement, entre une grosse ville comme Paris ou Lisbonne, les différences sont assez minimes. La réputation des parisiens au volant ressemble à s’y méprendre à la réputation des lisboètes. Nerveux, rapides à dégainer du klaxon si vous êtes un peu trop lent à démarrer au feu, c’est un peu la jungle urbaine.
En province, ça se passe un peu mieux, les limites étant globalement respectées. Peut-être un peu plus imprudents coté portugais, surtout aux abords des écoles…
Le passage piétons
Elle est là, la plus grosse différence. En France, pour qu’une voiture s’arrête, il faut souvent se jeter sur le passage piétons. Tant qu’on y a pas posé un pied, les voitures continuent leur chemin. Le code de la route est pourtant formel, un piéton a toujours la priorité, même lorsqu’il n’y a pas de passage pour lui !
En revanche, au Portugal, les voitures s’arrêtent systématiquement. Il suffit de s’approcher du passage piétons, encore sur le trottoir. Les rares voitures qui ne s’arrêtent pas (parce qu’elles roulaient trop vite) s’excusent souvent auprès du piéton.
Est-ce une différence de culture ? Ici, très certainement. Mais ça n’a pas grand chose à voir avec la culture latine, par exemple. En Espagne, les automobilistes ne s’arrêtent pas plus qu’en France pour laisser passer les piétons…
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