Grève des transporteurs routiers de matières dangereuses

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Les conducteurs routiers en ont assez de ne pas être entendus. Mais cette lutte sociale cache bien d’autres choses…

Que veulent les chauffeurs ?

En avril 2019, ils avaient obtenu gain de cause face à leurs entités patronales. Après leur grève de trois jours, leurs salaires devaient être augmentés en 2020, ainsi qu’une augmentation graduelle sur les deux ans suivants.

Il s’agit d’une augmentation conséquente, mais qui aux yeux du travail effectué, semble finalement peu de choses. Concrètement, on passerait de 1400 euros bruts en 2020 à 1800 euros bruts en 2022.

Cette augmentation est aujourd’hui niée par l’ANTRAM, l’association des transporteurs, c’est à dire les patrons.

Face à ce déni, les chauffeurs ont convoqué une nouvelle grève pour le 12 août 2019.

Une grève de ces chauffeurs, ce sont les livraisons de combustible qui sont menacées. Un arrêt de livraisons de plusieurs jours pourrait ainsi avoir des conséquences dramatiques sur l’économie du pays…

Ruée vers les stations service

Les français connaissent bien : dès qu’une grève de chauffeurs montre le bout de son nez, les automobilistes s’empressent de faire le plein.

Avec ces grèves, les portugais découvrent, et font de même. Juste au cas où.

Mais ce ne sont pas les voitures qui sont le plus à plaindre. La première victime, c’est l’aéroport de Lisbonne. Cette importante infrastructure n’a pratiquement pas de réserves de kérosène (deux jours tout au plus). Une grève trop longue clouerait au sol les avions… à moins de faire le plein à l’étranger.

Le syndicat, récent mais très actif

Autrefois, les chauffeurs n’avaient pas de syndicat qui puisse les représenter. Le « Sindicato Nacional de Motoristas de Matérias Perigosas » (SNMMP) est récent, novembre 2018, et depuis lors n’a pas cessé de lutter pour les droits de ses membres.

Le syndicat a rencontré un immense succès auprès de ces travailleurs. Sur les 800 personnes qui ont le droit de conduire un camion transportant des matières dangereuses, 600 étaient syndiquées en avril 2019 selon le président du syndicat Francisco São Bento.

La certification ADR : c’est ce « permis de conduire » spécial qui autorise un chauffeur routier à transporter des matières dangereuses. Il s’obtient après une formation spécifique.

Sous la houlette de Pedro Pardal Henriques, un avocat aux contours mystérieux, les chauffeurs se font désormais entendre auprès des autorités. Ce dirigeant syndical est bien connu en France, où il possède de nombreux intérêts. Il est en effet membre de la Chambre de commerce et d’industrie franco-portugaise (CCIFP).

Pedro Pardal Henriques

Services minimums

Face à l’ampleur de la grève en avril dernier, qui avait surpris tout le monde et peut-être même le syndicat, le gouvernement avait été obligé de réquisitionner des chauffeurs.

Pour le 12 août, le gouvernement prévoit de refaire appel à cet ultime recours, afin de « préserver la paix sociale ». En parallèle, le gouvernement est en train de former 500 chauffeurs afin de pouvoir contourner la grève en cas de besoin.

Pour le syndicat, cette décision est un déni de démocratie et de droits sociaux.

Lutte sur les réseaux sociaux

Cette grève est un exemple pour ceux qui s’intéressent aux manipulations médiatiques. Pour certains, les chauffeurs se font manipuler par l’avocat Pardal Henriques, afin de servir ses intérêts privés.

Il est vrai qu’il a une Maserati, et qu’il s’en sert pour ses déplacements, y compris lorsqu’il rejoint un piquet de grève. Une image qui a fait le tour de Facebook et de la presse en général. Etre riche, au Portugal comme en France, est assez mal vu.

L’ANTRAM ne se gêne pas de son côté pour dire que les chauffeurs sont très bien payés. Une fiche de paye a ainsi été relayée sur les réseaux sociaux, choquant la plupart des portugais.

Les gilets jaunes portugais

C’est peut-être le côté le plus inquiétant de cette lutte sociale. Au Portugal, c’est l’extrême droite qui anime les gilets jaunes, « coletes amarelos ». Ils essaient par tous les moyens de porter atteinte à la stabilité politique portugaise.

Jusqu’à maintenant, leur mouvement au Portugal a été tourné en ridicule. Personne n’y a adhéré. Les portugais semblent bien informés sur les intentions cachées du mouvement. Pour l’instant, c’est dans les urnes que la politique se fait, et non pas dans les rues.

Le rapport avec nos chauffeurs ? Les coletes amarelos ont affirmé leur soutien au mouvement gréviste et promettent effectuer une marche lente.

En attendant, sur les réseaux sociaux, peu de portugais comprennent vraiment la grève, estimant qu’ils sont plus à plaindre que les chauffeurs.


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