C'est une question qui peut sembler étrange, à l'heure des revendications en tout genre. Mais il existe certaines personnes qui ne supportent pas leurs origines portugaises.
Il y a longtemps, très longtemps, mes origines portugaises, humbles, ne me rendaient pas heureux. J’habitais dans une minuscule loge de concierge, avec mes parents à Paris.
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Je ne connaissais pas grand chose du Portugal, à part le soleil des vacances d’été. Tout mon entourage portugais était maçon, femme de ménage. Mon père, en tant qu’électromécanicien, faisait presque figure d’intellectuel. En un mot comme en cent : mes origines humbles me semblaient un fardeau.
Je n’avais que 10 ans. Pourquoi n’étais-je pas « Français » comme les autres? Pourquoi n’avais-je pas ma chambre ? Pourquoi ma mère n’était pas avocate ou architecte, au lieu d’être femme de ménage ? Pourquoi mes grands-parents habitaient si loin ?
J’étais en plein dans l’humilité portugaise des années 1980.
Et puis j’ai connu le Portugal…
De mes 12 à 14 ans, j’ai vécu au Portugal, auprès de ma grand-mère. Quelque part dans une campagne, où l’électricité était arrivée 15 ans plus tôt. Où l’école décrépie, où il pleuvait en salle de classe et les toilettes n’avaient pas de porte, faisait passer mon collège de Paris pour un palais royal.
Mais là, je n’étais qu’un parmi d’autres. Je n’étais pas de condition « inférieure », au contraire même. L’argent que mes parents envoyaient de France à ma grand-mère pour s’occuper de moi faisait vraiment une nette différence.
J’ai appris l’Histoire du Portugal, j’ai appris qu’il y avait aussi des personnes cultivées et que non, le Portugal n’était pas qu’un pays de maçons. Pour l’enfant de 12 ans que j’étais, ce fut un peu comme une révélation.
A mon retour en France, mon rapport avec le Portugal avait changé. Connaisseur de mon pays d’origine, j’étais maintenant capable de le défendre, pour que plus jamais on nous réduise à des ploucs.
Certains n’ont pas tourné la page
Malgré cela, encore aujourd’hui, certains Portugais restent discrets sur leur appartenance. Non, il ne s’agit pas de la crier sur tous les toits, mais il ne s’agit pas non plus d’entretenir le doute.
Oui, on m’a affirmé qu’il valait mieux se faire passer pour un Espagnol ou un Brésilien !
Et j’ai revu mon petit moi de 10 ans, qui ne voulait pas être réduit au fils de femme de ménage.
Une réduction qui n’a rien de honteuse, au contraire même aujourd’hui. J’ai peut-être plus de mérite que le fils d’avocat ! Mais c’est une autre histoire.
Il ne faut pas être fier d’être Portugais
Lorsque je suis revenu en France, lors de cette lointaine année 1992, beaucoup de choses avaient changé à Paris. En à peine deux ans, l’état d’esprit avait complètement changé. Il était désormais devenu pratiquement honteux d’être Français.
Il fallait s’afficher Portugais. Que s’est-il passé ? La montée des communautarismes ?
Il est vrai qu’elle fut salutaire dans les années 1990, il fallait sortir de cette espèce de honte des origines… mais nous sommes peut-être tombés dans l’excès inverse. J’en vois, qui sont culturellement beaucoup plus français que portugais, cracher sur la France.
C’est dommage.
Pourquoi ne pas être « fier » d’être Portugais ? Parce qu’on ne peut pas être fier pour ce qu’autrui a réalisé. Je suis heureux d’être Portugais. C’est une petite nuance, mais qui me tient à coeur, je ne peux être fier que de ce que j’ai fait de mes deux mains, pas celles des autres.
« On est les meilleurs au foot, je suis fier d’être Portugais ».
Oui, certes, mais je ne suis pas fichu de jouer correctement au foot, on fait comment ?
Mais il ne faut surtout pas en avoir honte !
S’il ne faut pas être fier de ce qu’à fait autrui, même compatriote, il faut par conséquent ne pas en avoir honte non plus. Lorsqu’un Portugais nous « fout la honte », c’est peut-être à nous de faire quelque chose de bien, pour équilibrer voir effacer cette « honte »… ou tristesse.
Je suis triste de voir mes compatriotes, surtout les Portugais de France, nous faire passer pour des ploucs, ou des gentils ignorants. On pourrait me retorquer que tous les pays du monde en ont. Mais pour un plouc allemand, on peut me retorquer 50 célébrités intellectuelles, sportives ou historiques, qui effacent totalement le plouc.
C’est ça, un pays et un peuple sûr de sa force.
Le Portugal est en train de changer, les Portugais de France sont en train de changer. En arrêtant d’être vus comme des ploucs, en mettant en avant nos Héros d’avant ou d’aujourd’hui, on changera ce sentiment diffus qui nous gêne. Ce sentiment qui provoque l’effet inverse dès qu’on a le moindre petit truc qui nous rend heureux. Une victoire au foot, un classement international qui dit qu’on est les meilleurs en quelque chose.
A nous d’y travailler. Continuons de dire qu’on est les meilleurs, quitte à en abuser et exagérer. Si on ne le fait pas pour nous, personne ne le fera à notre place. Arrêtons de nous porter en auto-dérision dévalorisante. On peut rire de soi-même, c’est vrai, mais remarquez la subtile différence entre un Français qui se moque de soi-même parce que « trop orgueilleux », un Allemand « trop rigoureux » ou un Japonais trop « travailleur », tandis que nous, nous sommes juste… « trop cons ».
Vous la voyez la différence ? Certains défauts peuvent être valorisants, pas les nôtres.
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