Bom Jesus de Braga
Bom Jesus de Braga

Bom Jesus de Braga : le sanctuaire aux Escaliers

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Au nord du Portugal se trouve une ville pas comme les autres dans le cœur des portugais : Braga, la ville des archevêques, est le berceau de la chrétienté de l’ouest ibérique. A ce titre, son importance religieuse pour le Portugal est fondamentale.


Des nombreux lieux de culte de Braga, un en particulier se distingue, par sa localisation, sa beauté et surtout par la spiritualité qui y règne : le Sanctuaire du Bon Jésus du Mont.

Braga la religieuse

Fondée depuis des temps immémoriaux par la tribu celte des Bracaros, elle prit toute son importance lorsque l’empereur romain Auguste fonda à son emplacement la ville romaine de Bracara Augusta. Cette fondation était culturelle : on montre aux peuples indigènes les bienfaits de la civilisation romaine. De Bracara Augusta partait alors la diffusion de la religion et de la culture romaine dans tout le nord-ouest ibérique. C’est la même stratégie qui avait été adoptée à Autun, parmi tant d’autres exemples, permettant ainsi de transformer les peuples conquis en futurs citoyens romains.

Vue générale sur les escaliers monumentaux et, au loin, la ville de Braga.
Vue générale sur les escaliers monumentaux et, au loin, la ville de Braga.

La légende nous dit que le premier évêque de Braga est Saint Pierre de Rates, l’un des premiers convertis par l’apôtre Saint-Jacques lui-même, qui l’aurait ordonné évêque. Jacques, est, toujours selon la légende, le grand évangélisateur de l’Hispanie. Saint-Jacques de Compostelle est d’ailleurs construite autour de son tombeau. Pierre de Rates connu un destin funeste, comme presque tous les premiers évangélisateurs : il mourut en martyr.

Bom Jesus de Braga
Bom Jesus de Braga

C’est au IIIème siècle que la ville est érigée en diocèse, mais ce n’est qu’en l’an 400 et le premier Concile de Tolède que nous avons des traces écrites du premier évêque de Braga attesté : Paterno de Braga. Ce premier évêque, décédé en 407, n’aura pas vu son pays occupé par les nouveaux arrivants, les Suèves, peuple « barbare » et conquérant de cette région de l’Empire Romain en 410. Les Suèves, adeptes de l’arianisme, feront de Braga leur capitale politique et religieuse, jusqu’en 584 lorsque le roi Wisigoth Léovigild termina la conquête du petit royaume suève.

Les Suèves ne se sont mis que tardivement au christianisme « officiel », le christianisme issu du Concile de Nicée (325) dont les catholiques et orthodoxes d’aujourd’hui se réclament. C’est Martin de Braga, un moine pannonien arrivé en 550 au royaume Suève qui tâchera de convertir les Suèves au catholicisme jusqu’à sa mort en 579. Martin de Braga, évêque de Dume près de Braga en 556 puis évêque de Braga en 569 est, dans l’histoire du catholicisme ibérique, d’une importance fondamentale. Ses écrits et ses traités de morale ont largement influencé la culture galaïco-portugaise : c’est à lui que l’on doit par exemple la dénomination actuelle des jours de la semaine en portugais, en révoquant les anciennes dénominations païennes. De « Lunae dies » (lundi), « Martis dies » (mardi) etc., on passe à la dénomination ecclésiastique, « feria secunda » (segunda-Feira, lundi en portugais), « feria tertia » (terça-feira, mardi en portugais, et ainsi de suite. On le surnomme, à juste titre, l’apôtre des Suèves.

Du haut de la colline, la vue sur Braga est époustouflante.
Du haut de la colline, la vue sur Braga est époustouflante.

De ce passé suève, Braga dispute aujourd’hui la revendication du « Primat de l’Espagne » à Tolède, un titre honorifique pour un archevêché. En effet, le diocèse de Braga est la plus ancienne de la péninsule ibérique selon la tradition, et les Suèves se sont convertis au catholicisme avant les Wisigoths, qui occupaient le reste de la péninsule. Rome a trouvé comment contenter les deux villes : les deux conservent tous les honneurs de la primauté, qui se sont, par la force de l’Histoire, de toute façon retrouvées dans deux nations différentes.

Après l’invasion musulmane au VIIIème siècle et la conséquente destruction en 715 de la ville, l’évêché fut transféré à Lugo, plus au nord. Cette destruction n’était pas le fruit du hasard : les musulmans connaissaient bien l’importance religieuse de la ville. Depuis, la ville passe plusieurs fois aux mains des chrétiens et des musulmans sur plus de deux siècles. Ce n’est qu’en 996 que Braga redevient pleinement et définitivement chrétienne. En 1070, Braga est rétablie en archevêché, la ville récupère alors toute son importance catholique.

Histoire du Bon Jésus de Braga

Avec la conquête définitive chrétienne, Braga peut enfin prospérer. Avec Diogo de Sousa, archevêque de 1505 à 1532, la ville connaîtra de profonds changements, renouvelée de fond en comble. On remplace les édifices romains ou médiévaux qui subsistaient encore par de nouveaux, plus en accord avec un pays qui était à cette époque l’un des plus riches du monde, faisant commerce aux quatre coins du globe. C’est dans ce contexte de renouveau qu’une petite chapelle dédiée à la Sainte Croix et présente depuis au moins 1373 sur une colline de Tenões, à proximité immédiate de la ville, va changer totalement de physionomie. Elle va devenir le sanctuaire que nous connaissons aujourd’hui. La légende populaire veut qu’après la Bataille de Tarifa en 1340 opposant les Chrétiens aux Maures, une croix est apparue dans le ciel de la colline où se trouve aujourd’hui le sanctuaire. Immédiatement, l’archevêque et les habitants de Braga ont érigé sur l’emplacement une croix et la première petite chapelle.

Entrée d'une chapelle.
Entrée d’une chapelle.

La colline où se situe cette première chapelle, le « monte Espinho », littéralement le « mont épine » en français est un peu à l’écart de la ville. C’est un lieu de dévotion très ancien, que la construction d’autres chapelles ne fera que renforcer. Une deuxième chapelle y est construite en 1494 par l’archevêque Jorge da Costa, qui voulait édifier sur la colline un Chemin de Croix. Une troisième chapelle plus grande sera bâtie en 1522. Désormais, la colline et ses trois chapelles est un lieu de pèlerinage populaire.

En 1629, la première confrérie est instituée, en charge de conserver et d’embellir cette colline dédiée à Dieu. Ils avaient pour but de raviver la flamme de la dévotion populaire, ternie par le fil du temps. Ce n’est réellement qu’en 1722 que tout débute, avec le programme d’embellissement de la ville de l’archevêque Rodrigo de Moura Teles. Son programme est conforme à la mode de l’époque : les nouvelles constructions seront de style Baroque ou Rococo, faisant de Braga la capitale portugaise  de ce type d’architecture. C’est à cette date que débute la construction du symbole du Bon Jésus de Braga : ses escaliers monumentaux, les « Escadórios do Bom Jesus », avec en pièce maîtresse « l’Escalier des Cinq Sens ».

Blason de Rodrigo de Moura Teles
Blason de Rodrigo de Moura Teles

Le XVIIIème siècle sera ainsi consacré à la construction et l’embellissement de la colline, avec en 1784 le début de l’édification du temple actuel sur ordre de l’archevêque Gaspar de Bragança, en remplacement de l’église originelle construite par Rodrigo de Moura Teles, devenue bien trop petite pour tant d’affluence. Cette nouvelle église néoclassique ne fut terminée qu’en 1811, après bien des soucis provoqués par les invasions napoléoniennes. Il faut dire que le succès de ce pèlerinage a été bien aidé par la demande de Gaspar de Bragança à la Curie romaine de concéder aux pèlerins de Braga un Jubilée.

Le XIXème siècle sera quant à lui consacré à l’amélioration permanente de la colline sacrée, avec de meilleures accessibilités pour les nombreux pèlerins et fidèles en quête de spiritualité. C’est en 1882 que fut inauguré le funiculaire, toujours en service aujourd’hui. Il s’agit du plus ancien funiculaire au monde toujours en fonctionnement utilisant des contrepoids d’eau. Il est bien pratique pour ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas franchir les escaliers monumentaux à pied.

Le câble du funiculaire.
Le câble du funiculaire.
Le funiculaire et son fort dénivelé.
Le funiculaire et son fort dénivelé.

Escaliers monumentaux du Bon Jésus et Chemin de Croix

Trois escaliers qui se succèdent rythmés par 17 paliers permettent de relier la ville à l’église, franchissant un dénivelé de 116 m. C’est eux que l’on vient voir, quand on vient au Bon Jésus. C’est ici que les fidèles peuvent « payer » leurs « promesses ». Une promesse, pour un catholique portugais, c’est en quelque sorte un contrat avec Dieu : « mon Dieu, si tu exauces mon souhait, je te promets de monter les escaliers du Bon Jésus à genoux ». On peut promettre n’importe quoi, mais les actes de pénitence sont très populaires. Je ne comprends pas très bien en quoi se faire souffrir dans la chair inciterait Dieu à nous exaucer, mais la Foi ne s’explique pas.

La tentation de descendre plutôt que de monter est forte. Le sol est soigneusement décoré.
La tentation de descendre plutôt que de monter est forte. Le sol est soigneusement décoré.

Tout au long du parcours ont été édifiées 17 chapelles, souvent remaniées le long des années, avec des démolitions et des reconstructions. Chacune marque les différentes stations de la Via Crucis, le Chemin de Croix. La volonté première des archevêques était que le pèlerin saisisse pleinement qu’il était victime des illusions transmises par ses sens. En montant les escaliers, le pèlerin part à la rencontre de la Vérité, transmise par le respect des vertus théologales : Espérance, Foi et Charité.

En plus des significations traditionnelles catholiques, il existe une deuxième grille de lecture au Bon Jésus de Braga, pour ceux qui y sont sensibles : un « parcours alchimique », que l’on peut suivre en montant les escaliers.

Escalier du Portique

C’est le premier escalier à franchir. Son début est marqué par un portique, ici une entrée en arc de cercle. Sur ce portique, on peut y voir le blason de son commanditaire, l’archevêque Rodrigo de Moura Teles. De chaque côté du début de l’escalier, deux fontaines. Un peu plus haut, de part et d’autre du portique, deux chapelles protégées par un toit à quatre pentes, l’une dédiée à la Cène et l’autre dédiée à l’agonie de Jésus dans le Jardin des Oliviers. Ainsi débute le Chemin de Croix.

Portique du bon Jésus de Braga et les deux premières chapelles du Chemin de Croix.
Portique du bon Jésus de Braga et les deux premières chapelles du Chemin de Croix.

Les escaliers serpentent à travers le Parc du Bon Jésus. Au fur et à mesure de notre ascension, nous pouvons découvrir les autres chapelles du Chemin de Croix. Les premières chapelles rencontrées sont toutes accompagnées d’une fontaine, dédiée à un dieu païen. La première des fontaines est dédiée à Diane, une figure adaptée pour un parcours alchimique : l’arc et la flèche indiquent que l’on se trouve sur le bon chemin. La chapelle correspondante est celle de la trahison de Judas.

Portique du bon Jésus de Braga et les deux premières chapelles du Chemin de Croix.
Une des premières chapelles du Chemin de Croix, avec à sa droite sa fontaine « païenne ».

Se suivent la fontaine de Mars et la Chapelle des Ténèbres, la fontaine de Mercure et la Chapelle de la Flagellation puis finalement la fontaine de Saturne, associée à la Chapelle du Couronnement d’Epines.

Chapelle du Couronnement d’Épines et fontaine de Saturne, où l'on peut se rafraîchir.
Chapelle du Couronnement d’Épines et fontaine de Saturne, où l’on peut se rafraîchir.

Cette association entre un dieu païen et les stations du Chemin de Croix permettent au pèlerin de se trouver d’un côté face à la vérité du calvaire de Jésus, et d’un autre côté face au « mensonge » des croyances païennes. Pour le simple promeneur, pouvoir boire de l’eau dans une des fontaines et se rafraîchir est aussi un confort à ne pas ignorer.

Sur l’avant-dernier palier se trouvent deux fontaines très curieuses de chaque côté de l’escalier. Ce sont deux colonnes où s’enroulent un serpent, l’eau coulant de leur bouche puis le long de leur dos. Les deux chapelles qui s’y trouvent sont dédiées au « Ecce Homo » et au Chemin du Calvaire. Originellement, nous pouvions également y trouver la fontaine de Jupiter, déplacée depuis à proximité d’un hôtel du Parc.

Fin de l'escalier du Portique, avec ses fontaines en forme de serpent qui s'enroule autour d'une colonne.
Fin de l’escalier du Portique, avec ses fontaines en forme de serpent qui s’enroule autour d’une colonne.
Le Terreiro das Chagas, où débute l'Escalier des Cinq Sens. Au premier plan, la fontaine des Cinq Plaies.
Le Terreiro das Chagas, où débute l’Escalier des Cinq Sens. Au premier plan, la fontaine des Cinq Plaies.

Ce premier escalier se termine sur le « Terreiro das Chagas », en français la « Cour des Plaies », où se trouvent deux chapelles, la Chapelle de Simon de Cyrène et la Chapelle de la Crucifixion. Nous pouvons y trouver également une fontaine dédiée à la Passion, œuvre de l’architecte André Soares, la « Fonte das Cinco Chagas », ou Fontaine des Cinq plaies. Sur cette fontaine d’où s’écoule l’eau par cinq orifices, des instruments de torture y ont été représentés : pince, corde, marteau et une discipline, une sorte de petit fouet.

C’est ici que débute le deuxième escalier monumental.

Escalier des Cinq Sens

Le parcours sinueux de ce monument évoque le corps humain, ou, dans sa lecture alchimique, le caducée de Mercure. A chaque palier de l’escalier se trouve une fontaine, symbolisant chacune un des cinq sens. Le sens figuré se devine très simplement : l’eau coule de la fontaine par le sens en question. Pour chaque sens représenté, des statues évoquant un passage de l’Ancien Testament lui fait contrepoint, que je vous traduis ici du latin du mieux que je peux. L’archevêque Rodrigo de Moura Teles ayant décédé (1728) avant d’avoir pu débuter les travaux de cet escalier, ce furent les Jésuites qui choisirent les thèmes qui y sont illustrés.

A gauche, la fontaine de la Vision. A droite, une des deux fontaines serpent.
A gauche, la fontaine de la Vision. A droite, une des deux fontaines serpent.

La fontaine du premier sens, la vision, porte l’inscription « Homme prudent, prends-les pour un rêve et ainsi tu seras attentif ». L’eau coule par les yeux d’un visage. Dans sa main, une paire de lunettes, suggérant ainsi la faiblesse de ce sens face à la connaissance.

Des aigles y sont représentés. La statue de Moïse qui l’accompagne nous dit : « ceux qui blessés regardaient guérissaient ». L’autre statue, celle de Jérémie, qui a dans sa main droite un bâton avec des yeux, porte l’inscription « je vois un bâton vigilant ». Le bâton est le symbole de la connaissance, permettant au sage de cheminer en sécurité.

Détail de la fontaine de l'ouïe.
Détail de la fontaine de l’ouïe.

La fontaine du deuxième sens, l’ouïe, porte l’inscription « qui chantait au son de la cithare, présidant ceux qui chantaient et louaient le Seigneur ». L’eau coule par les oreilles. Nous pouvons y voir des bœufs. Au-dessus, la statue d’Idithun jouant de la cithare, l’un des quatre grands maîtres de la musique au Temple de Jérusalem. A ses côtés, la statue de David, qui joue de la harpe, nous dit : « à mon oreille tu donneras du plaisir et de la joie ». La statue féminine, « l’épouse des Chants », qui joue de la lyre, nous dit : « ta voix sonne à mes oreilles ».

Au premier plan à droite, la statue de Sulamite. Derrière à gauche, la fontaine de l'odorat.
Au premier plan à droite, la statue de Sulamite. Derrière à gauche, la fontaine de l’odorat.

La fontaine du troisième sens, l’odorat, porte l’inscription « donnez des fleurs comme le lys et répandez une douce odeur ». L’eau coule par le nez de la figure centrale. Deux chiens y sont figurés. Cette fontaine est associée aux statues de Noé et de Sulamite (la préférée des épouses de Salomon). Cette dernière porte l’inscription « Ta stature est semblable à un palmier… et l’odeur de ta bouche est comme celle des pommes ». Souvenons-nous que la pomme est le fruit de la connaissance.

Détail de la fontaine de l'odorat, avec l'eau qui coule des narines du personnage, et les deux chiens de chaque côté.
Détail de la fontaine de l’odorat, avec l’eau qui coule des narines du personnage, et les deux chiens de chaque côté.

La fontaine du quatrième sens, le goût, voit son eau couler par la bouche de la figure. La statue représente Joseph, fils de Jacob, portant un calice et une pomme, avec l’inscription « que ton pays soit plein des bénédictions du Seigneur, des fruits du ciel et de la rosée ». Il est accompagné de singes. La statue de Jonathan porte l’inscription « j’ai gouté un peu de miel sur le bout d’un bâton et voici pourquoi je meurs ». Sur la deuxième statue, celle d’Esdras, il est écrit : « goûte le pain et ne nous abandonne pas, comme le berger au milieu des loups ».

A gauche, la fontaine du toucher. A droite, la fontaine du goût.
A gauche, la fontaine du toucher. A droite, la fontaine du goût.

Sur la fontaine du cinquième et dernier sens, le toucher, est représentée une personne qui porte dans ses mains une cruche d’où coule l’eau. L’animal représenté sur cette dernière fontaine est l’araignée, tisserande de la Réalité et maîtresse du destin. La statue de Salomon nous dit : « mes entrailles ont tremblé à son toucher ». Cette statue est accompagnée de celle d’Isaïe, portant l’inscription « il a touché ma bouche ». Une autre statue, d’Isaac aveugle levant les mains à la recherche de son fils, porte l’inscription « approche-toi de moi mon fils, pour que je te touche »

Personnage biblique de l'escalier des Cinq Sens.
Personnage biblique de l’escalier des Cinq Sens.

Avant le renouveau du sanctuaire à la fin du XVIIIème siècle, c’est ici que se terminait le parcours du pèlerin, qui pouvait alors entrer dans l’église. Le succès de ce lieu de pèlerinage obligea l’archidiocèse à effectuer de profonds bouleversements. Pour avoir plus de place, on démolit l’ancienne église et on en reconstruit une autre un peu plus haut sur la colline. Pour y accéder, il fallait un nouvel escalier supplémentaire.

Escalier des Vertus

Ce dernier escalier est l’œuvre de Carlos Amarante, ingénieur et architecte originaire de Braga, qui fut également chargé de construire la nouvelle église. Les trois vertus théologales que tout homme se doit d’atteindre sont le thème central de cet escalier, après qu’il ait pris conscience de la fragilité de ses perceptions humaines en ayant gravi les marches de l’escalier précédent, dédié aux cinq sens.

Escalier des Vertus. Au centre, la fontaine de la Foi.
Escalier des Vertus. Au centre, la fontaine de la Foi.

Sur la fontaine de la Foi, nous pouvons lire « de lui coulent des eaux vives ».  L’eau coule d’une croix, aux emplacements des clous de la crucifixion. Au-dessus, la Foi est représentée par une femme aux yeux bandés, avec l’inscription « avec le cœur on croit pour atteindre la Justice ». Elle tient dans sa main droite un serpent et dans sa main gauche un bouclier décoré d’une tête d’éléphant. La fontaine est accompagnée de deux statues allégoriques, la Confession et la Docilité.

Fontaine de l'Espoir.
Fontaine de l’Espoir.

Sur la fontaine de l’Espoir se trouve une représentation de l’arche de Noé posée sur le Mont Ararat. De l’arche coule l’eau, et nous y lisons « arche dans laquelle se sont sauvées des âmes ». La statue représentant l’espoir tient dans sa main gauche une ancre et dans sa main droite une colombe. Elle porte l’inscription « En attente de l’espoir du bonheur éternel et la venue de la Gloire éternelle ». Les deux statues allégoriques qui accompagnent la fontaine de l’Espoir sont la Gloire et la Confidence.

Fontaine de la Charité.
Fontaine de la Charité.

Enfin, sur la fontaine de la Charité se trouvent deux enfants, d’où l’eau coule du cœur qu’ils portent. Au-dessus, la Charité est représentée par une femme portant deux enfants. Il est écrit : « il existe trois vertus… mais la plus grande, c’est la Charité ». La fontaine de la Charité est accompagnée des deux dernières statues allégoriques de l’Escalier des Vertus, la Paix et la Bénignité.

Sur l’avant-dernier palier se trouvent deux chapelles, dédiées au remords de Saint-Pierre et à Marie-Madeleine.

Terreiro de Moisés et la fontaine du Pélican au centre.
Terreiro de Moisés et la fontaine du Pélican au centre.

L’Escalier des Vertus se termine par le « Terreiro de Moisés », la « Cour de Moïse », où autrefois se trouvait un labyrinthe jardiné. On y trouve la fontaine du Pélican. Le pélican déchire sa poitrine pour donner à manger à ses enfants, symbolisant ainsi les maîtres qui se sacrifient pour donner la connaissance à leurs élèves. Sur la Cour de Moïse, on peut voir également la statue équestre de Saint Longin le Centurion, sculptée par Pedro José Luis en 1819. Les deux chapelles qui se trouvent sur la cour sont dédiées à l’érection de la croix et à la descente de la croix.

Fin de l'Escalier des Vertus.
Fin de l’Escalier des Vertus.
Les jardins sont soigneusement décorés.
Les jardins sont soigneusement décorés.

Terreiro dos Evangelistas, la Cour des Evangélistes

Le Chemin de Croix que l’on parcourt le long des escaliers monumentaux ne se termine pas à l’église. Il faut continuer son chemin en continuant de grimper la colline et en pénétrant dans le Parc. On retrouve une fontaine dont on ignore le nom, mais qui semble être dédiée à Hercule. L’homme représenté chevauche une bête, en tenant dans sa main droite un gourdin et dans sa main gauche un bouclier.

Sur le point le plus haut de la colline se trouve une statue d’un homme plantant sa lance dans le sol, d’où jaillit l’eau. Il s’agirait de Moïse.

Dans le Parc, on trouve encore deux chapelles supplémentaires qui terminent le Chemin de Croix traditionnel avant d’atteindre la destination finale, le « Terreiro dos Evangelistas ». Sur cette cour octogonale se trouvent les trois dernières chapelles, et quatre fontaines, chacune dédiée à un évangéliste. La construction de cette cour se termina en 1765, probablement issue des plans d’André Soares.

Terreiro dos Evangelistas, et sa grande fontaine centrale.
Terreiro dos Evangelistas, et sa grande fontaine centrale.
Terreiro dos Evangelistas, fontaine de Saint Jean.
Terreiro dos Evangelistas, fontaine de Saint Jean.

Les trois stations qui s’y trouvent sont donc des étapes supplémentaires du Chemin de Croix, et représentent des scènes postérieures à la Passion du Christ : l’apparition à Marie-Madeleine, les disciples d’Emmaüs et l’Ascension.

Détail d'une chapelle du Terreiro dos Evangelistas.
Détail d’une chapelle du Terreiro dos Evangelistas.

Eglise du Bon Jésus de Braga

Devant l’église se trouve la dernière des cours, « Adro do Bom Jesus », où se trouvent 8 statues, représentant les différents intervenants de la Passion du Christ : les grands prêtres du temple de Jérusalem Anân et Caïphe, Hérode Antipas, Joseph d’Arimathie, Nicodème, Longin et finalement, représenté deux fois, le romain et préfet de Judée Ponce Pilate.

Eglise du Bon Jésus du Mont
Eglise du Bon Jésus du Mont
Le temple, de style néoclassique.
Le temple, de style néoclassique.

La grande église est de style néoclassique, se mariant parfaitement au style baroque que l’on retrouve sur l’Escalier des Cinq Sens. Son plan est classique, en croix latine. On reconnait bien le style néoclassique sur sa façade, avec son fronton triangulaire et l’utilisation de deux ordres de l’Antiquité : le Toscan sur le niveau inférieur et le Ionique sur le supérieur.

Elle est le résultat d’un concours lancé par l’archevêque Gaspar de Bragança, avec pour vainqueur Carlos Luis Ferreira Amarante, qui peut remplacer l’ancienne église déjà en ruines de Rodrigo de Moura Teles. Pour l’anecdote, pour réunir l’argent nécessaire à sa construction, il fallut faire appel à la générosité du peuple : une des nombreuses actions de récolte de fonds fut l’organisation d’une corrida en 1785. Ce n’est qu’en 1857 que l’église sera consacrée.

Nef de l'église et ses chapelles latérales.
Nef de l’église et ses chapelles latérales.
Intérieur de l'église du Bon Jésus de Braga.
Intérieur de l’église du Bon Jésus de Braga.
Le plafond de l'église est décoré de peintures. On aperçoit la coupole.
Le plafond de l’église est décoré de peintures. On aperçoit la coupole.

A l’intérieur, assez sobre, on y trouve quatre chapelles latérales. Le point d’intérêt est, à mes yeux, la représentation du Calvaire sur le maître-autel. C’est une sculpture saisissante datant de 1808 de José Monteiro da Rocha, un artiste local. Les tableaux sont de Pedro Alexandrino, peints pendant la deuxième moitié du XVIIIème siècle.

Image du Bon Jésus, destination finale des fidèles. Elle se trouve dans la chapelle du Bon Jésus.
Image du Bon Jésus, destination finale des fidèles. Elle se trouve dans la chapelle du Bon Jésus.
Orgue du sanctuaire, fabriqué en 1798 par Manuel de Sá Couto.
Orgue du sanctuaire, fabriqué en 1798 par Manuel de Sá Couto.
La coupole est décorée des blasons pontificaux et des archevêques.
La coupole est décorée des blasons pontificaux et des archevêques.
Calvaire du maître-autel, sculpture de Monteiro da Rocha.
Calvaire du maître-autel, sculpture de Monteiro da Rocha.
Autel des reliques.
Autel des reliques.
Autel du Saint Sacrement
Autel du Saint Sacrement
Notre Dame des Sept Douleurs.
Notre Dame des Sept Douleurs.
Détail d'un des deux clochers.
Détail d’un des deux clochers.
Horloge de la façade.
Horloge de la façade.
Statues de Saint Luc et de Saint Jean sur la façade de l'église.
Statues de Saint Luc et de Saint Jean sur la façade de l’église.

Parc du Bon Jésus

La colline est entièrement boisée, mais ce ne fut pas toujours le cas : ce n’est qu’au XIXème siècle que l’on y planta les arbres que l’on peut voir aujourd’hui. Il s’agit d’un grand parc paysager, où les habitants de Braga, les pèlerins et les touristes viennent se détendre et se promener en empruntant les différents chemins qui y ont été aménagés. Plusieurs lacs artificiels y ont été créés, le plus grand permettant même de faire des balades sur des barques. On y trouve toutes les commodités modernes, pour qui voudrait y rester quelques jours, le temps de se ressourcer dont des hôtels et des restaurants.

Boutique de souvenirs. Les azulejos sur la gauche nous l'indiquent de belle façon.
Boutique de souvenirs. Les azulejos sur la gauche nous l’indiquent de belle façon.
Hôtel du Parc.
Hôtel du Parc.
Petit jardin juste derrière l'Hôtel du Parc et l'église.
Petit jardin juste derrière l’Hôtel du Parc et l’église.
Côté latéral de l'église, avec à gauche la boutique de souvenirs.
Côté latéral de l’église, avec à gauche la boutique de souvenirs.

La dévotion au « Bon Jésus » est très populaire dans le monde lusophone. Il s’agit de Jésus, lorsqu’il souffre la Passion. C’est ainsi un Jésus plein de compassion, de bonté et de pardon, symbolisant toute la souffrance humaine.

Hôtel du Temple, tout de suite à droite de l'église.
Hôtel du Temple, tout de suite à droite de l’église.

Il faut noter que de nombreux monuments portugais ont été réalisés par des architectes étrangers. Ce n’est pas le cas au Bon Jésus de Braga, ce qui en fait un monument deux fois national à mes yeux. Il a en outre inspiré d’autres monuments de l’espace lusophone, avec par exemple le Sanctuaire du Bon Jésus de Matosinhos à Congonhas au Brésil ou Notre Dame des Remèdes à Lamego, Portugal.

Trois façon de venir au Bon Jésus : à pied, par la route ou en funiculaire.
Trois façon de venir au Bon Jésus : à pied, par la route ou en funiculaire.

Bom Jesus, Patrimoine Mondial de l’Humanité, UNESCO

Le sanctuaire est depuis le 7 juillet 2019 un patrimoine de toute l’humanité. Ses célèbres escaliers marquent la fin d’un chemin de croix pas comme les autres…

L’inscription du Bom Jesus au patrimoine mondial de l’Humanité n’est, aux yeux des portugais, que justice. Comme le Brésil l’a souligné lors de la consultation de l’UNESCO, ce monument a, entre autres, servi d’inspiration à leur sanctuaire du Bom Jesus de Congonhas, qui lui était déjà inscrit.

ICOMOS

C’est le principal organisme mondial sur lequel se base l’UNESCO pour attribuer le titre de patrimoine mondial. L’ICOMOS (Conseil International des Monuments et des Sites) avait soulevé quelques questions, toutes répondues et résolues avec brio par Braga.

Pour avoir l’honneur d’être inscrit au patrimoine de l’Humanité, il faut pouvoir répondre à des critères très stricts, au delà de l’importance historique ou architecturale. Les doutes de l’ICOMOS concernaient :

  • L’authenticité et intégrité du monument. Un édifice trop restauré ou modifié au fil du temps risque de ne pas pouvoir être inscrit.
  • La sécurité des personnes, les risques d’accident.
  • Possibilité d’incendies. En effet, le sanctuaire est intégré dans un bois où l’on se promène à l’ombre des grands arbres.

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