Fisga, en portugais, c'est un lance-pierres. Le personnage qui accompagnera les militaires en Angola en porte un en permanence. Souvent accompagné de de fort belles demoiselles, les aventures de Zé da Fisga étaient l'un des rares moments de détente d'une guerre difficile.
Un soldat de la guerre coloniale
Comme Zé da Fisga, son auteur était un soldat, détaché en Angola. Une guerre qui dura de trop longues années, de 1961 à 1974.
Sommaire
Une guerre édulcorée
Dans les dessins de Nando, pseudonyme de Fernando Gonçalves, pas de violence, de blessés ni de morts. On n’observe la guerre que d’un seul côté. Pas de politique non plus, et Zé da Fisga ne se pose jamais de questions… mais cette guerre, il n’en voulait pas.
Le but de Nando n’était pas politique, il semble n’avoir cherché que le divertissement des militaires. De toute façon, la censure l’aurait empêché de s’exprimer pleinement.
Nando
Fernando Gonçalves est né en 1940, à Póvoa de Varzim. A l’âge de 14 ans, son talent pour le dessin se révèle pleinement lors de ses études à la Escola de Artes Decorativas Soares dos Reis, à Porto.
Le dessin, il en a fait son métier, au détriment de la musique, qu’il pratiquait également. Bon violoniste, il préféra travailler dans la publicité, les arts graphiques ou la décoration.
Il créa son personnage alors qu’il était encore en métropole, pendant sa formation militaire, où il obtient le grade de sergent.
En 1962, il est envoyé à Cabinda en Angola. Il intègre la « Companhia de Caçadores Especiais 371« , Compagnie de Chasseurs Spéciaux 371.
Il occupera ses rares temps libres à illustrer des situations cocasses avec son personnage fétiche, Zé da Fisga.
Revenu en 1975 chez lui à Póvoa de Varzim, il y ouvre un atelier de peinture. Artiste réputé, il s’illustrera par de nombreux travaux encore visibles aujourd’hui dans sa ville natale. Les azulejos à l’entrée du port de pêche sont de lui.
Il décéda en 2018. Sa ville lui rendit hommage, avec l’inauguration d’une statue à son effigie, où on le voit jouer du violon devant son matériel de peinture…
Un anti-héros
Zé da Fisga sera publié dans le magazine Notícia, basé à Luanda. Notícia était un magazine de plus en plus populaire, et sa distribution s’étendait de plus en plus, en Angola d’abord, puis en métropole et dans les autres colonies portugaises ensuite. Cette large diffusion en faisait une cible de choix pour la censure.
Nando n’a été, selon lui, censuré qu’une fois. Sur un dessin, il y avait écrit « make love not war », le fameux slogan antimilitariste américain. Il le changea en « make war with love ».
Zé da Fisga, c’est clair, ne fait pas de politique. Tant et si bien qu’au retour de la démocratie, Nando n’a jamais voulu publier son personnage dans des journaux, pour ne pas être récupéré.
Zé da Fisga est un gars simple, qui ne pense qu’à une seule chose : les filles. Là-dessus, aucune xénophobie malgré le contexte. Il drague toutes les jeunes filles qui passent à proximité !
Les dessins de Nando nous montrent une autre version de la guerre. Une version où des blancs vivent en paix avec des noirs. Une version où tout ce qui comptait vraiment, c’était d’être heureux.
Nous sommes dans les années 1960. Avec son ton humoristique, Zé da Fisga était quelque part un précurseur. La mode des personnages qui étaient des « héros à l’envers » commençait à peine, avec bien sûr Gaston Lagaffe. Zé da Fisga était lui aussi un gaffeur, fainéant, incompétent et distrait, en plus d’être un coureur de jupons. Il avait sur son dos un sergent irascible.
Tout pour faire rire les militaires et pas seulement.
S’il porte un lance-pierre, c’est parce qu’avant de partir en Angola en tant que militaire, Nando dû attendre une interminable distribution d’armement…
Aujourd’hui, un personnage comme Zé da Fisga serait impossible. La femme n’est qu’un objet, il fume et fait de la publicité pour des cigarettes, en plus de boire des bières.
La vidéo nous montre une publicité pour les piles TUDOR de 1968, seul film d’animation avec Zé da Fisga. Réalisé par Nando à Luanda, il a été fait avec la débrouillardise portugaise légendaire. Peu de moyens mais beaucoup de résultats.
Sources
- « Zé da Fisga »: retrato do soldado português na Guerra Colonial.
- Fernando Gonçalves, « Nando »
- Nando – Fernando Gonçalves, o autor do anti-heroi «Zé da Fisga» homenageado na Povoa de Varzim em 2020
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